Magnum Analog Recovery
« Le métier de photographe, c'est d'être entre pickpocket et funambule. » — Henri Cartier-Bresson
A propos de
Magnum a 70 ans. Non contents d'avoir imposé le copyright en photographie, ses fondateurs (Capa, Cartier-Bresson, Rodger, Seymour et Vandivert) ont imaginé un statut, inédit à l'époque, de coopérative, encore détenu aujourd'hui à part égale et uniquement par ses photographes membres.
Il y a quelques mois, les photographes m'ont demandé d'ajouter une pierre à cet édifice si souvent célébré, publié, exposé. Au même moment, un fonds de milliers de tirages d'époques était enfin rendu accessible : Magnum Analog Recovery. Conservé dans les archives de Magnum à Paris dans des boîtes au nom de chaque photographe, ce fonds rassemble des tirages cartoline envoyés aux agents européens de Magnum pour diffusion à la presse, de 1947 à la fin des années 1970.
Ce fonds remarquable ne contient pourtant qu'une infime part des centaines de milliers de tirages distribués sur plus de 30 ans par le bureau de Paris et bien souvent, les images les plus célèbres manquent. De même, les tirages sont rarement légendés, le texte et les légendes tapés à la machine qui les accompagnaient n'ayant pas toujours été conservés. Un champ immense s'ouvre donc aux chercheurs.
« La guerre est terminée. Les quatre membres fondateurs de Magnum se retrouvent sans travail. Ils décident alors de créer un « club fraternel », une agence de presse qui exigerait des magazines de ne pas recadrer les images, de ne pas modifier les légendes, de rester fidèle à l'intention éditoriale du photographe. Désormais, ils décident de ne plus être dépendants des commandes d'un seul magazine, mais de vendre leurs reportages aux titres du monde entier : un plan grandiose pour des photographes au chômage. » — Cornell Capa
Pour ma part, j'ai éprouvé une joie intense à parcourir ces boîtes en flâneur, déambulant dans la grande histoire comme dans celle de chaque photographe, comme on parcourt un album de famille, vaste comme le monde et intime comme un miroir de poche. Quelques icônes, choisies au milieu de beaucoup d'autres, y côtoient une matière brute plus rare : des pépites peu ou jamais publiées, parfois oubliées des photographes eux-mêmes.
Pour accompagner la découverte de ces tirages, exposés au BAL pour la première fois, seuls les mots des photographes m'ont paru légitimes. Ils évoquent la question centrale de la position (éthique, politique, sensible) du photographe face à son sujet, qui trouve sa traduction formelle dans le placement des corps dans l'espace du cadre. Se confrontent ainsi au fil du temps, autant d'approches contradictoires du métier de photographe. Un envers du décor, parsemé de doutes et de tensions, qui rend plus vibrant encore le parcours de ces témoins du transitoire.
Diane Dufour
Carte de visite
Jusqu'au 27 aout 2017
www.le-bal.fr/